Billet: Lefebvre c. Andritz Hydro Canada inc. – antécédents judiciaires et omission de divulguer

Date14 novembre 2023
Auteur Guillaume Grenier
Sujet Billet juridique

Lefebvre Andritz Hydro Canada inc., 2023 QCTAT 4400 (juge administratif Erick Waddell)

Dans ce dossier, le plaignant, un responsable des ventes et de l’exécution, formule une plainte en vertu de l’article 124 de la Loi sur les normes du travail (« LNT ») alléguant avoir fait l’objet d’un congédiement sans cause juste et suffisante. L’employeur, qui admet les faits relatifs aux conditions d’exercice du recours, déclare toutefois que le plaignant a été congédié pour une cause juste et suffisante, soit de ne pas l’avoir informé qu’il faisait l’objet d’accusations criminelles à caractère sexuel.

L’employeur précise que ce ne sont pas les accusations elles-mêmes qui ont motivé la terminaison de son emploi, mais bien son omission de l’en informer. Il affirme que cela correspond à un manque de transparence, d’intégrité et de loyauté ayant entraîné la perte de confiance de l’employeur à son égard, laquelle revêt une importance rehaussée ici vu le statut de cadre du plaignant.

Le Tribunal rappelle qu’une personne accusée doit être présumée innocente jusqu’à preuve du contraire et, comme tout autre individu, elle a droit au respect de sa vie privée. Un employeur ne peut congédier un salarié en raison d’accusations criminelles déposées contre lui si celles-ci n’ont aucun lien avec son emploi, compte tenu de l’interdiction de la discrimination fondée sur les antécédents judiciaires prévue à l’article 18.2 de la Charte des droits et libertés de la personne.

Selon le Tribunal, l’employeur n’a pas démontré que l’omission du plaignant de dévoiler qu’il faisait l’objet d’accusations criminelles constitue un manquement à son obligation de loyauté et de transparence assimilable à une faute grave qui justifierait son congédiement immédiat. Le Tribunal conclut qu’il était légitime pour le plaignant de penser qu’il n’avait pas à dévoiler les accusations à l’employeur.

De plus, l’employeur n’a pas démontré à la satisfaction du Tribunal que la non-divulgation des accusations à l’employeur causait de réelles difficultés, la preuve révélant que l’employeur ne se fondait que sur des appréhensions et des craintes face à l’impact de ces informations à l’égard de la clientèle et des autres employés.

Le Tribunal conclut que l’employeur avait à sa disposition des moyens pour réagir à d’éventuelles conséquences qui auraient pu découler de la révélation des accusations portées contre le plaignant, de sorte que le recours empressé au congédiement ne pouvait se justifier, d’autant plus que la preuve n’établissait pas de difficultés réelles en ce qui concerne la clientèle et les autres employés. Ainsi, en l’absence d’une faute grave, le Tribunal conclut au caractère excessif du congédiement. La plainte est donc accueillie.

Cette décision fait présentement l’objet d’une demande de révision administrative devant le TAT.